Homo Deus de Yuval Noah Harari ou la fin de l’homme ? (I)

Je viens de finir Homo Deus de Yuval Noah Harari, le livre dont tout le monde parle. Ce livre m’a tellement impressionnée que j’ai décidé de lui consacrer quatre billets correspondant aux trois chapitres de l’ouvrage. En préambule, je voudrais souligner que c’est mon ressenti personnel, le ressenti d’une femme occidentale, fascinée depuis très longtemps par le temps : le temps qui passe et celui qui vient. Yuval Noah Harari déchire le voile du futur en s’appuyant sur le temps qui passe. Il propose une vision d’historien de sujets éminemment prospectifs : l’intelligence artificielle, les data, l’immortalité technologique…Ce faisant, il bouscule les fondements de l’économie, de la politique et de la philosophie.

Le style de l’œuvre est déroutant : des phrases courtes, une volonté presque excessive de « faire de la pédagogie », de simplifier à l’extrême des problèmes complexes, d’utiliser un vocabulaire du quotidien. En cela, il va à contre-courant d’un certain académisme littéraire et pseudo-scientifique. Peut-être en fait-il un peu trop dans le côté voisin de palier alors que c’est un universitaire reconnu. Il n’étale pas sa culture malgré une bibliographie conséquente de plus de 20 pages où les neurologues, les historiens et les sociologues se taillent la belle part.

 

Les trois parties se veulent chronologiques, la troisième seule est prospective. Les deux premières sont, effectivement, une brève histoire de l’humanité (sous-titre du livre qui n’est pas sans rappeler l’ouvrage de Jacques Attali). La vision historique de l’homme qu’il propose est fascinante car, à la fois très globalisante et très micro. Il s’attache à des aspects de notre genèse vue sous un angle totalement original. Ainsi, nous avons droit à une histoire du gazon comme signe des évolutions socio-économiques de l’Occident. Je ne regarde plus du même œil le gazon de mon jardin le matin, ni celui du parc de Sceaux où j’ai mes habitudes.

L’introduction (le nouvel ordre du jour humain) décrit la formidable aventure humaine, une épopée de résistants, de résilients qui ont tout subi : la famine, la maladie, la guerre…Et pourtant, sommes-nous plus heureux que nos ancêtres les chasseurs-cueilleurs ? Cette réflexion sur le bonheur est un premier pas vers la thèse du livre : celui d’un homme augmenté (ou pas) qui est devenu un Dieu dans un ciel vide. L’homme moderne est bourré d’antidépresseurs et de somnifères pour oublier cette quête perpétuelle et vaine du bonheur. Il y est décrit comme un concentré de réactions chimiques, d’hormones et de neurotransmetteurs. Le bonheur serait une alchimie biochimique avant tout. Une certaine vision mécaniste (voire descartienne) et nietzschéenne de l’homme est proposée. Immortalité, bonheur et divinité, voici les préoccupations de l’individu du XXIème siècle. A l’heure où l’immortalité est possible, où l’homme est Dieu et où l’illusion du bonheur est un dû, il se pourrait bien que nous mourions définitivement. Bref, que le bel ordre du jour que l’homme se propose de vivre dans le futur soit un leurre complet.

A bientôt pour la suite…