Dans ce premier chapitre, Yuval Noah Harari relate la conquète du monde par Homo Sapiens. Il se pose trois questions :

  1. Quelle est la différence entre les humains et tous les autres animaux ?
  2. Comment notre espèce a-t-elle conquis le monde ?
  3. Homo Sapiens est-il une forme de vie supérieure ou juste la brute du coin ?

En quelques siècles, cette “espèce de singe ” qu’est l’homme a réussi à presque éradiquer les grands animaux sauvages de la terre. Si l’on raisonne en biomasse, ils représentent 100 millions de tonnes contre 300 millions pour les humains et 700 millions pour les animaux domestiques. Homo Sapiens a fait rentrer le vivant dans l’ère anthropocène, l’époque de l’humanité. Pourtant, l’homme est encore une production archaïque. Elle est dans ses gênes et racontée par son histoire. Les animistes voient l’homme comme un descendant des reptiles, notre cerveau dont nous sommes si fier est construit autour d’un noyau reptilien.

Les organismes sont des algorithmes, les animaux sont nos semblables

Tout est algorithme de la recette de la soupe de légumes à celle qui régit la reproduction via les émotions. Les animaux comme l’homme ressentent l’amour, l’attachement, la peur. D’où l’injustice qu’on leur fait en les traitant si mal. Pour l’auteur, nous avons passé un pacte, un deal agricole. Les mythes fondateurs du monde agricole comme le déluge nous apprennent que nos actions peuvent détruire l’écosystème d’où la notion de deal ou de contrat. “Les forces cosmiques accordèrent aux humains la domination sur les autres animaux sous réserve qu’ils s’acquittent de certaines obligations envers les Dieux, la nature et les animaux eux-mêmes”.

La révolution agricole a fait naître les religions théistes. La révolution industrielle a permis l’émergence de la religion humaniste. C’est la grande hypothèse du livre. Homo Deus ne peut fonctionner que grâce à la religion humaniste. Sans elle, le monde se disloquerait en guerres, rivalités et meurtres incessants. Placer l’homme au dessus de tout permet de garantir l’ordre social.

Au sein de cette religion humaniste, s’imposent peu à peu des principes moraux sur notre façon de vivre avec les animaux. Ces principes gagnent en force (véganisme, législations protectrices, mouvements de consommateurs pour des élevages respectueux de la vie…). Et si, alors que l’homme est au dessus de tout, ce soudain intérêt pour une vie inférieure (ou considérée comme telle) n’était qu’une anticipation de notre propre destin. Le jour où les robots représenteront une forme supérieure d’intelligence, l’homme ne pourra compter que sur sa religion humaniste pour se sauver. Il deviendra l’égal de l’animal dans la hiérarchie et les robots-maîtres pourraient ne voir en lui qu’une ressource ou un surnuméraire (un être inutile dans la chaîne de valeur de la création).

L’étincelle humaine existe-t-elle ?

Les animaux ont-ils une âme ? L’homme a-t-il une âme ? Grande question, lorsque seuls 15% des Américains pensent qu’Homo Sapiens a évolué grâce à la sélection naturelle et sans intervention divine. Les idées de Darwin sont farouchement combattues. L’homme tient à son âme, concept mis en brèche par la théorie de l’évolution. Pour elle, “l’idée que mon vrai moi soit une essence indivisible est rejettée car nous sommes des entités (de l’homme à l’éléphant en passant par l’arbre) composées de parties plus petites et plus simples qui se mélangent et se séparent sans cesse”. Si l’existence de l’âme est difficile à prouver, qu’en est-il de la conscience ? Là aussi, la conscience serait spécifiquement humaine et les robots en seraient totalement dépourvus. En fait, 99% des activités de notre corps interviennent sans nécessité de conscience, de façon automatique, gouvernées par des flux chimiques et électriques.

Certes, mais l’homme a un esprit…Pourtant, le siège de l’esprit est dans le cerveau. Où exactement ? Et si l’esprit existe, les robots en ont-ils un ? Pour le savoir, il suffirait de leur appliquer le fameux test de Turing. Un humain communique avec un ordinateur et une personne réelle. Si l’ordinateur est pris pour un humain, il a réussi le test, celui de prouver qu’il possède également un esprit. Sans revenir sur la dramatique histoire d’Alan Turing, un des pères de l’informatique moderne, qui passa sa vie “à faire comme si” il était hétérosexuel alors qu’il était homosexuel et vivait dans la terreur d’être démasqué, le test de Turing ne mesure qu’une convention : seul importe ce que les gens pensent de vous. S’ils vous voient comme ayant un esprit, alors vous en avez un. Certes, nous sommes aujourd’hui capables de détecter des signatures de la conscience chez les animaux qui prouveraient qu’ils possèdent ce que nous n’arrivons pas à nommer : âme, esprit,conscience…

 

Les fictions qui donnent sens au monde

Face à ce relativisme extrême, l’étincelle humaine ne serait-elle pas plutôt sa formidable capacité à créer des collaborations au sein de communautés ? Un chapitre est consacré à la révolution roumaine et au moment où le dictateur a été renversé presque en direct par un premier sifflet, suivi de centaines d’autres, puis d’une colère révolutionnaire qui a tout balayé sur son passage. Qui a sifflé en premier ? Quel est le mécanisme qui fait que, soudain, se crée une communauté d’intérêt qui s’affranchit de peurs ancestrales pour bouleverser l’ordre établi ? Et cet ordre, sur quoi repose-t-il ?

 

La réalité n’est pas subjective ou objective mais intrasubjective. Un dollar ou un euro sont des réalités intrasubjectives qui n’ont pas de propriétés objectives mais un pouvoir conféré par le groupe. En allant plus loin, histoire et biologie vont se confondre. Les fictions humains vont se traduire en codes génétiques et électroniques. Le robot parfait sera fait à notre image mais également à celle dans laquelle nous nous projetons. Ce sont les fictions humaines qui donnent sens au monde d’aujourd’hui et à celui de demain.