Homo Sapiens donne sens au monde. Ainsi, trois questions se posent :

  1. Quel genre de monde les humains ont-ils créé ?
  2. Comment les humains se sont persuadés que, non contents de dominer le monde, ils lui donnent aussi du sens ?
  3. Comment l’humanisme – le culte de l’humanité – est-il devenu le plus important de toutes les religions ?

Les animaux sont ancrés dans le réel. Il y a longtemps qu’Homo Sapiens considère d’un oeil froid et dominateur les rivières, les forêts et le monde physique qui l’entoure. Homo Sapiens vit dans des fictions qu’il s’est créées, des concepts comme Apple ou la République Française. Les fictions les plus puissantes du monde antique sont, outre les Dieux, l’écriture et l’argent. Aujourd’hui, les marques peuvent être assimilées aux Dieux d’antan. L’écriture donne une réalité puissante aux choses. Elle est la matérialisation de règles, décrets, ordres qui régissent le monde. L’argent reste le pivôt de la société d’aujourd’hui. Pourtant, on pourrait objecter que les écritures ont causé des millions de morts (la famine en Chine causée par de mauvaises récoltes aux statistiques faussées) et que les marques ne sont que des avatars fragiles des grands dieux égyptiens ou grecs.

Yuval Noah Harari conclut qu’au XXIème siècle “nous allons créer des fictions plus puissantes et des religions plus totalitaires qu’à aucune autre époque”. Ceux que l’auteur appelle les conteurs prennent une importance considérable dans la société de demain car “être capable de distinguer la fiction de la réalité et la religion de la science deviendra plus difficile que jamais mais aussi plus vital “. 

Le couple dépareillé : science -religion

L’essor de la science rendra certains mythes plus puissants que jamais car il les rendra possibles. L’immortalité sera, peut être, un jour banale grâce à la science. Les religions peuvent se penser, non pas comme un chemin spirituel, mais comme un outil de préservation de l’ordre social. Quant au rapport science/religion, il est très fécond. Le barrage des Trois-Gorges sur le Yangzi Jiang qui revenait à inonder plus d’une centaine de villages était un projet scientifique dont l’acceptation reposait sur la religion-idéologie de la doctrine du parti communiste chinois imprégné de confucianisme.

La religion s’intéresse à l’ordre, la science au pouvoir. Science et religion font passer l’ordre et le pouvoir avant la vérité. Ce deal entre elles repose sur un même principe, une sorte de méta-religion qui régit, à la fois le dogme et la recherche scientifique. Cette méta-religion s’appelle l’HUMANISME.

 

Le Deal moderne : renoncer au sens en échange de pouvoir

L’homme mourrait, souffrait et trouvait du sens à sa propre finitude et à sa vie difficile. Il avait, paradoxalement, plus d’importance dans le cosmos qu’aujourd’hui. Il était acteur d’un scénario qui le dépassait mais qui avait un sens. La culture moderne est assise sur une désespérante absurdité. Nous ne sommes rien, il n’y aura pas de dénouement heureux ni malheureux. Il n’y aura d’ailleurs AUCUN dénouement. Nous n’avons aucun rôle, ni aucune mission. Le deal moderne est :

  1. Tu acceptes le vide de ton existence.
  2. La science pourvoiera à tout : progrès technologique, richesse, confort matériel et peut être un jour immortalité.

 

Résultat, une course effrénée à la croissance qui nous plonge dans un véritable enfer écologique. La mort des Dieux et les dangers qui s’amoncellent sur nos têtes ne freinent pas la révolution humaniste qui a su créer ordre et prospérité. Voici ses préceptes :

En politique, l’électeur sait mieux.

En économie, le client a toujours raison.

En art, la beauté est dans l’oeil du spectateur.

En éducation, pense par toi même.

En éthique, si ça fait du bien, fais le.

Les religions et les doctrines politiques ne proposent plus de lecture cohérente du monde puisqu’elles n’arrivent pas à “penser la science”. Les techno-religions vont s’imposer et définir une nouvelle éthique et la fin d’une forme de liberté, contingentée et prédite par l’intelligence artificielle. “Quand le génie génétique et l’IA révèleront tout leur potentiel, le libéralisme, la démocratie et le libre marché pourraient bien devenir aussi obsolètes que les silex”.